Avec Kahina Bahloul, Sr Nathalie Becquart, Haïm Korsia, Frédéric Lenoir, Monseigneur Matthieu Rougé et animé par Marie Guerrier.
Verbatim Voir Message du Pape François : "Je suis heureux de pouvoir vous envoyer chers entrepreneurs et entrepreneuses de France ce bref message à l'occasion de votre rencontre annuelle. Quand je pense aux chefx d'entreprise, le premier mot qui me vient à l'esprit est bien commun. Il n'est en effet pas possible aujourd'hui d'imaginer une amélioration du bien commun, c'est-à-dire de la vie économique et sociale, de la justice, des conditions de vie des plus pauvres, sans considérer les entrepreneurs comme des acteurs du développement et du bien-être. Vous êtes un moteur essentiel de la richesse, de la prospérité."
"Le premier capital de votre entreprise, c'est vous ! Aujourd'hui, les nouveaux défis de notre société ne peuvent être relevés sans de bons entrepreneurs."
"Nous sommes dans une période urgente, vous devez faire plus, nos enfants vous diront merci et moi avec eux."
Haïm Korsia : "Les religions ont su se transformer, l'enjeu est de contextualiser la parole de Dieu pour qu'un texte qui a 3500 ans soit toujours actuel."
"On ne peut transmettre quelque chose sans y ajouter quelque chose de plus moderne."
"Il faut garder l'ADN des religions en les adaptant."
Monseigneur Matthieu Rougé : "Les religions sont heureuses de survivre en se transformant constamment."
Kahina Bahloul : "La question religieuse reste en France très tendue."
"La crise que vit aujourd'hui l'Islam est une crise de l'inculture. Il faudrait enseigner l'histoire de la pensée religieuse, afin de donner aux jeunes générations les outils nécessaires pour qu'ils puissent comprendre le monde dans lequel on évolue."
Sr Nathalie Becquart : "On n'a jamais la foi ou la religion à l'état brut, elles s'expriment toujours dans un contexte."
"Chaque église est façonnée par la géographie, la culture et l'histoire."
"Nous ne sommes pas dans un monde qui change, mais dans un changement de monde."
"Ce qui est bousculé aujourd'hui dans l'église, c'est le rapport à l'institution."
Haïm Korsia : "Si on apprend à la jeunesse à se poser toujours les bonnes questions, alors on la rend adaptable et cela est vrai aussi dans la foi. C'est ce qu'on appelle l'espérance."
Frédéric Lenoir : "Rien n'est plus urgent que d'apprendre aux enfants à développer un esprit critique."
Haïm Korsia : "Il est bon de faire un pas de côté pour penser différemment."
Kahina Bahloul : "Il manque aujourd'hui une envie de transcendance."
Sr Nathalie Becquart : "Les jeunes sont traversés par les questions du monde actuel, ils veulent être écoutés et être acteurs du changement du monde."
Monseigneur Matthieu Rougé : "Les jeunes sont en demande de réalisation spirituelle tout en étant enracinés dans le monde contemporain, dans ce contexte nous devons encourager les jeunes à œuvrer pour la transition écologique tout en les préservant de l'angoisse de cette transition."
Kahina Bahloul : "Je suis frustrée que l'on ne puisse pas faire comprendre aux jeunes le côté lumineux des religions à travers l'enseignement."
Sr Nathalie Becquart : "Ce dont nous manquons le plus, c'est de ressources pour le discernement et pour cela, on a besoin de ne pas être seul."
Haïm Korsia : "Pour être certain d'avancer, il faut se laisser envahir par l'immuable et l'immuable dans les religions, ce n'est pas Dieu, mais le rapport à l'autre."
Bruno Tertrais : "Nous ne sommes plus à l'époque où la démographie faisait la puissance. Aujourd'hui, le nombre compte moins. Mais tout de même, on n'a pas de grandes puissance économiques sans une population importante, pour produire et pour consommer."
"Aujourd'hui, trois mondes se dessinent : l'Afrique où la poussée démographique est extrême, l'Eurasie en passe de s'effondrer démographiquement et enfin quelques grandes démocraties, comme l'Inde et les Etats-Unis, qui sont en relative bonne santé démographique."
Jacques Attali : "L'Europe est très bien placée pour être la superpuissance à tous points de vue, mais n'a pas l'énergie du projet."
"Nous avons besoin des générations futures et avons besoin de les former. L'éducation est un facteur clé, ainsi que la formation professionnelle."
"Il n'est pas du tout normal qu'un étranger en situation irrégulière n'ait pas le droit de travailler… cela le pousse à la délinquance."
"Les Européens sont les seuls à ne pas savoir qu'ils ont les meilleures conditions de vie. Nous sommes pessimistes parce que ça va bien et qu'on pense que cela va aller plus mal." Pour aller plus loin Voir « Dieu est mort ! Dieu reste mort ! Et c’est nous qui l’avons tué ! » déclarait Nietzsche à la fin du XIXeme, face à un judéo-christianisme qui perdait peu à peu sa force. Mais où en sont les religions aujourd’hui et quel sera leur avenir ? L’opposition entre le sacré, qui réfère à tout ce qui est divin ou transcendant, et le profane, qui englobe notre quotidien ordinaire, a toujours été centrale dans les débats philosophiques. Aujourd’hui, si certains prédisent un déclin de la religiosité dans le monde moderne, d’autres estiment au contraire que les religions continueront à jouer un rôle fondamental dans nos sociétés et dans les interactions humaines… et force est de constater qu’on peut hélas encore tuer au nom de Dieu. Si en Occident nous assistons à une sécularisation croissante de la société et que les progrès de la science et de la technologie ont conduit à une remise en cause des dogmes religieux, ailleurs dans le monde, la religion continue de jouer un rôle central dans la vie quotidienne des individus, de façon d’ailleurs souvent fort négative pour les femmes. Les religions ont également su s’adapter aux évolutions du monde moderne en adoptant de nouvelles formes d’expression et en utilisant les médias sociaux et Internet pour diffuser leurs messages et fidéliser de nouveaux adeptes. Face aux difficultés de la vie et à la quête de valeurs, la religion reste pour beaucoup la solution. L’affirmation selon laquelle la croyance aux dieux et aux divinités s’éteindra complètement ne semble donc pas du tout fondée.
Le poids du sacré
Hans Joas, un des poids lourds de la sociologie allemande, dénonce dans son livre « Les Pouvoirs du sacré » l’idée de l’irréversible sécularisation du monde moderne. Pour lui, il faut compter, au contraire, « sur des résurgences régulières de sacralité. Et les sociétés occidentales contemporaines, dit-il, n’n’en ont pas fini avec le religieux, car la modernité n’est nullement réductible à la désacralisation et à la sécularisation des sociétés ». Sonia Mabrouk partage cette conviction de la force du sacré. Pour elle, « le sacré correspond à une part irréductible de l’Homme. Il renvoie à des invariants indépassables de sorte qu’aucune culture ne peut se passer de sacré, ni même le renier ». Elle déplore d’ailleurs que « le sacré soit absent aujourd’hui des discours publics, du moins dans l’Occident européen, comme s’il n’avait plus droit de cité dans le débat ».
Pour Flaubert, « les dieux n’étant plus, et le Christ n’étant pas encore, il y a eu, de Cicéron à Marc-Aurèle, un moment où l’homme a été seul ». Pour Sonia Mabrouk, notre époque est semblable à celle-là. Or, l’’homme seul est fragile et capable de croire à tous les gourous et à toutes les fables.
Le sacré peut bien sûr aussi être source de conflit et de violences surtout quand il est férocement religieux et clérical. Mais se réduit-il forcément à la religion ? Pas si sûr. Il y a du sacré en dehors des églises, des mosquées et des synagogues, partout où la quête de l’absolu, du sublime, existe et où il y a des rites. Dans « Le Sacré hors religions », essai pluridisciplinaire écrit sous la direction de Françoise Champion, Sophie Nizard et Paul Zawadzki, il est expliqué que « le sacré se déplace hors religions vers le domaine de l’existentiel, de la vie personnelle, mort, sexualité, souffrance, âge de la vie, procréation ».
Quoi qu’il en soit, religieux ou pas, le sacré semble bien indispensable à l’homme, mais quelle forme prendra-t-il à l’avenir ? Comment vont évoluer les religions et quelles nouvelles formes de culte peuvent-elles apparaître ?
Quels nouveaux cultes demain ?
La religion et la croyance en des divinités ont été une caractéristique intrinsèque de la vie humaine depuis des millénaires, mais l’évolution des croyances est un processus complexe et multifactoriel.
Avant Mohamed, avant Jésus, avant Bouddha, il y avait Zoroastre. L’histoire montre que les religions naissent, grandissent et meurent. Même les religions dominantes d’aujourd’hui ont continuellement évolué. Il a par exemple fallu trois siècles pour que l’église chrétienne se consolide autour d’un canon d’écritures, avant de se scinder en deux en 1054, puis en de multiples groupes de plus en plus disparates. Et des évolutions similaires se retrouvent partout. Les traditions religieuses savent généralement se transformer ou se réinventer pour rester pertinentes dans un monde en mutation. Les religions peuvent évoluer en raison des changements sociétaux, des avancées scientifiques et des nouvelles interprétations des textes sacrés. Le syncrétisme et les interactions entre différentes religions peuvent aussi entraîner des adaptations, des influences réciproques et des révisions des pratiques et des enseignements. Il est également tout à fait possible que de nouvelles croyances et mouvements religieux surgissent, comme cela s’est toujours produit au cours des siècles.
Cependant, il est difficile de prédire exactement quelles formes prendraient ces nouvelles religions ou à quel point elles pourraient influencer les systèmes de croyances déjà établis. Certaines de ces nouvelles religions pourraient rester de petits mouvements de niche, tandis que d’autres pourraient gagner en popularité et en influence au fil du temps. En dehors même des religions à proprement parler, de nouvelles formes de cultes et de spiritualités peuvent aussi voir le jour. Par exemple, les pratiques de spiritualité et de bien-être, telles que la méditation, le yoga ou le développement personnel, prennent de l’ampleur dans de nombreux pays et certains voient là une forme de culte.
Autre exemple, la montée en puissance des réseaux sociaux et des plateformes en ligne permet l’émergence de communautés virtuelles, où les gens partagent des croyances et des pratiques spirituelles. Ces communautés en ligne peuvent également développer de nouvelles formes de culte basées sur la technologie, telles que des cérémonies virtuelles ou des rituels numériques. Certains voient également la climatologie ou le transhumanisme comme de nouveaux cultes. Même les anciens dieux reviennent. En Europe, on assiste ainsi à un regain d’intérêt pour le paganisme. Réinventer des traditions « indigènes » à moitié oubliées permet d’exprimer des préoccupations modernes tout en conservant la patine du temps. En Islande, par exemple, la foi Ásatrú, petite mais en pleine expansion, n’a pas de doctrine particulière, si ce n’est des célébrations quelque peu archaïques des coutumes et de la mythologie nordiques anciennes, mais elle est active sur les questions sociales et écologiques. Il en va de même pour le druidisme au Royaume-Uni. Il s’agit de croyances de niche pour le moment, mais qui sait comment avec le temps elles peuvent évoluer. Après tout, peut-être que les grandes religions qui couvrent le monde aujourd’hui sont moins durables que nous le pensons. Et peut-être que la prochaine grande religion ne fait que commencer ?
« Si Dieu n’existait pas, il faudrait l’inventer », écrivait Voltaire.